ARCHITECTE ET... SAPEUR POMPIER

Architecture et risques : un métier

Justine REVERCHON, architecte, présidente de la SAS JRA « Justine Reverchon Architecte » et sapeur-pompier professionnel

« Je voulais être architecte parce que c’est une profession respectée, comme avocat ou médecin. Mais contrairement aux avocats et aux médecins, il n’y a pas beaucoup d’architectes qui ont un engagement humanitaire. En général, ils travaillent pour des privilégiés. Moi, cela ne me suffit pas. » Shigeru Ban

Parcour (s) ?
Pompiers et architectes, deux métiers « genrés » masculins, très difficiles d’accès.
Avant le plafond de verre, n’y a-t-il pas le plancher de verre ?

En 1998, si j’entame des études d’archi, c’est pour rentrer pompier... oui oui. Un rêve d’enfant, aider les autres. Le concours de capitaine de sapeur-pompier professionnel est alors accessible notamment aux titulaires du diplôme d’architecte DPLG, appréciant les sciences et l’Art, je me lance.
Imprévu : mes études sont un véritable coup de cœur.

En parallèle j’essaye de rentrer sapeur- pompier volontaire... je n’y parviens qu’au bout de 6 ans ! Trop fille, trop blonde, trop d’études. Une fois rentrée le « combat » continue pour être enfin intégrée. Puis je passe le concours
de sapeur, rentre alors sapeur-pompier professionnel, à la base, dans les rangs, pour être sur le terrain ! Une passion.

Mon parcours est alors décrié tant du côté pompier, que du côté archi « Comment un architecte peut-il vouloir faire autre chose que de la maîtrise d’Œuvre ??? » « Tu prends la place de jeunes qui voudraient être pompiers, alors qu’avec tes diplômes, tu devrais être officier ! ».

Architecte ou Pompier : les deux !
Je reprends vite mes études en parallèle de ma vie professionnelle, je passe mon TPFE sur la thématique de l’urgence, forcément ! Depuis je me spécialise sur la question des risques. Aujourd’hui je suis à mi-temps architecte, à mi-temps sapeur-pompier.

Architecte et pompier : un lien possible.
En 2020 : découverte de la notion de résilience par le plus grand nombre. Prévention, prévision, diagnostics, expertises, confortements :
de nouvelles missions pour les architectes.

Aujourd’hui, a contrario de mes premières années, différents acteurs viennent me chercher pour cette double casquette.

Le travail de sapeur-pompier influe positivement sur la pratique d’architecte,
le rapport aux autres est plus simple, ma gestion des chantiers et surtout des soucis est grandement facilitée par mes capacités de gestion en urgence.

Le travail d’architecte influe positivement sur la pratique de sapeur-pompier, de même ! Mes connaissances bâtimentaires sont très utiles dans ma pratique de sapeur-pompier.

Mes deux métiers, pratiqués en parallèle, me permettent d’enrichir chacune de mes pratiques professionnelles par l’autre. D’expérience en expérience, les deux se croisent et se nourrissent.

Ma vie, plus difficile à gérer avec cette double profession, est plus riche et je ne souhaiterais abandonner ni l’une ni l’autre.

n°49 - hiver 2020