profession

L’envie de fabriquer du beau

Céline Mayer, architecte urbaniste.

En mai 2017, la loi a introduit la notion de compétences dans la procédure de Permis d’Aménager, en mentionnant les compétences « ?nécessaires en matière d’architecture, d’urbanisme et de paysage ? » puis en précisant qu’au-delà de 2 500 ?m² de surface de terrain la compétence clairement « ?d’un architecte au sens de l’article ?9 de la loi 77-2 du 3 ?janvier 1977 ? » était requise.

Ainsi, l’architecte est rentré officiellement dans le jeu de l’aménagement du territoire.
Le constat était que la qualité des opérations était parfois bien médiocre, constituant petit à petit ce panorama de la « ?France moche ? ». Ainsi, le législateur a souhaité modifier la donne en luttant contre la banalisation de l’habitat et du « ?fameux ou hideux ? » lotissement.

Aujourd’hui, presque un an après, il est bon de s’interroger sur les avantages et inconvénients de cette loi et sur la plus-value de l’architecte dans ce dispositif.

On pourrait dire que la loi est injuste et a mis de côté des professionnels qui exerçaient dans le domaine de l’urbanisme et du paysage depuis des années et qu’elle est par conséquent contreproductive.
On pourrait dire que la loi a répondu à un vaste et bel objectif d’une toute petite manière, que l’enjeu environnemental est bien supérieur à la proposition législative faite…
On pourrait dire beaucoup de choses et critiquer… Mais, au final, est-ce que ce discours a un sens dans notre société ? Est-ce que cette position n’est pas plus fatigante que celle de faire de son mieux avec ce qui nous est donné ?

Aujourd’hui, en tant qu’urbaniste, je suis formatrice pour MAJ-formation auprès des architectes. À ce titre, j’ai constaté à quel point leur envie de s’investir dans le mieux vivre était forte, à quel point ils s’interrogeaient de manière humble sur leur rôle au sein d’une équipe pluridisciplinaire, à quel point ils sont pertinents sur des réflexions d’implantations bâties, de prescriptions de façades, d’ombres portées, d’ambiance, à quels points la question de l’urbanisation leur est chère in fine… Ils ont conscience de ne pas tout savoir et de devoir apprendre, mais ils ont envie de fabriquer du beau pour nos villes et ils ont déjà une sensibilité esthétique et la fibre créatrice pour modifier le paysage, alors laissons-les nous prouver leurs talents. Nous avons besoin d’imaginer de nouveaux cadres de vie et de penser de manière durable et cohérente la ville et la campagne face aux enjeux environnementaux. Le permis d’aménager est une des solutions pour y parvenir.

308+ n°39 - format pdf à télécharger
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