urbanisme

Innover dans l’urbanisme ordinaire

Jacques DUHART, directeur du CAUE des Landes (Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement).

Contrairement aux idées reçues, parler d’urbanisme dans les Landes n’est pas paradoxal.

Loin du cliché révolu de pays désertique et vieillissant, loin des modèles structurants mais périmés de la MIACA (Mission Interministérielle d’Aménagement de la Côte Aquitaine), il y a la réalité d’un territoire attractif, très différencié dans ses dynamiques et dans ses évolutions. Le département gagne plus de 5 000 habitants par an. à ce rythme, les Landes pourraient passer de 340 000 habitants en 2000 à plus de 500 000 en 2040. La mutation du rural à l’urbain se manifeste surtout sur les zones littorales et rétro littorales, près du BAB (Bayonne, Anglet, Biarritz) et autour des petites villes de l’intérieur. Ainsi, grâce à un solde migratoire de 2,4 %, la Communauté de Communes Maremne Adour Côte-Sud (MACS), peut désormais revendiquer 60 000 habitants et une densité de population égale à la moyenne nationale (100 habitants par kilomètre-carré).

Historiquement habitués aux mutations, la plupart des élus landais prennent leurs responsabilités et font face aux grands enjeux contemporains : maîtriser les prix du foncier, contenir la pression de la périurbanisation venant de Gironde et des Pyrénées Atlantiques, gagner en densité tout en préservant le paysage, la nature et l’identité territoriale… Ainsi, dans tout le département, nos petites villes et villages, s’engagent dans des démarches d’urbanisme durable, des schémas directeurs, des éco quartiers : Aire-sur-l’Adour, Arue, Biscarrosse, Cagnotte, Dax, Linxe, Mont-de-Marsan, Saint Perdon…

Une exposition, réalisée par l’Union Régionale des CAUE d’Aquitaine, témoigne de certaines de ces expériences, dont plusieurs ont été impulsées par le CAUE. Depuis 3 ans, notre CAUE propose aux territoires ruraux et aux petites villes, un accompagnement spécifique en matière d’urbanisme durable, des ateliers de terrain, des journées d’échanges thématiques, des cahiers techniques. L’objectif est de bâtir des projets adaptés et innovants, sans s’enfermer dans les normes et les recettes.

Dans nos territoires dépourvus d’agences d’urbanisme, l’émergence de projets de référence est plus difficile que dans les aires métropolitaines. Néanmoins, de multiples acteurs locaux et régionaux, publics et privés, coopèrent sur les formes urbaines et architecturales, les procédés constructifs… y compris dans les territoires les moins urbanisés (cf. workshop récemment organisé par la communauté de communes du Pays d’Albret avec l’école d’Architecture de Bordeaux). Les villes de Mont de Marsan et Dax œuvrent à la rénovation de leurs centres et de leurs liaisons douces. Elles organisent leur avenir à l’échelle de l’agglomération. Les SCOT et PLU se généralisent. Seul l’urbanisme commercial laisse dubitatif.

Certains architectes, urbanistes et aménageurs, revisitent, pour leurs vertus pédagogiques, des référents culturels fondateurs, comme la bastide gasconne ou le quartier d’airial. Mais la clairière forestière n’est plus un modèle écologique. Le castor landais n’a pas été actualisé. Et Pierre Lajus attend encore l’héritier de sa Girolle.

Le travail tant réglementaire qu’architectural reste à faire pour que la maison à jardin intime, alignée sur une limite parcellaire, combinée aux petits groupés ou collectifs, dans un environnement laissé plus naturel, devienne enfin l’instrument d’une densité renforcée, raisonnable et séduisante.

L’audace d’un urbanisme moderne et inspiré, impose aujourd’hui un renouvellement plus accompli du référentiel architectural, urbain et paysager ; une offre mixte profondément repensée, combinant un habitat dense individualisé, du végétal
et une formule d’habitat intermédiaire, plus intégrée et recevable au plan culturel, social et économique…

L’économie résidentielle, le thermalisme
et le tourisme sont ici des moteurs du développement du territoire. C’est pourquoi, dans l’architecture et l’urbanisme ordinaire des Landes, l’innovation est une exigence de progrès qui déborde les principes d’une conception durable et la performance énergétique. Pas question de reproduire en HQE le pavillonnaire et les cités des années 70. Les opérateurs et tous les intervenants d’un projet doivent être au quotidien des défricheurs.

Oser inventer les modes d’habiter, les styles et les cadres de vie de demain, pour mieux intégrer les nouvelles villes et les nouveaux quartiers landais qui se construisent aujourd’hui.

n°19 - mars 2013