développement durable

Construire à plusieurs ou comment les habitants s’impliquent dans la fabrication de leur quartier ?

Elodie vouillon , conseil en architecture et urbanisme au C.A.U.E Gironde

Gouvernance, participation, implication, consultation… au-delà de l’effet mode, quel contenu derrière ces mots ? La participation de l’habitant peut prendre plusieurs formes et s’opérer à divers degrés pour élaborer durablement et ancrer tout projet. Deux exemples de l’Europe du Nord
et un proche de nous, pour illustrer « brèvement » ce propos et démontrer l’intérêt d’une démarche aussi riche et que constructive de faire la ville… et loin d’être nouvelle !

Copenhague / 500 000 habitants
— quartier Vesterbro­

Ancien quartier insalubre, l’îlot Hedebygade de 19 immeubles fait l’objet d’un plan de rénovation urbaine écologique dès 1990. La gestion des travaux étant confiée à une équipe de consultants de type coopératif – SBS (architectes, sociologues, animateurs de quartier…), les habitants participent activement à chaque étape du programme avec concertation avant travaux allant de la planification générale aux actions spécifiques par immeuble. Notons le financement partagé de l’opération : ministère de l’Urbanisme, ville, propriétaires. Le Centre pour la rénovation urbaine de Vesterbro (semi-public) assure le relais avec l’habitant. Aujourd’hui, au-delà de la réussite écologique de la rénovation, le vivre ensemble fonctionne au quotidien avec une maison communautaire largement utilisée (laverie, salle commune) et ce malgré les intrusions répétées de visiteurs en quête d’exemplarité…

Malmo / 250 000 habitants
— Ekostaden Augustenborg­

Quartier d’habitat collectif de l’après-guerre, Augustenborg­ rassemble 1 800 logements dans un contexte de chômage, population immigrée, forte rotation et inondations fréquentes, ce jusqu’en 2000, date de naissance du projet Ekostaden Augustenborg qui place les habitants au cœur du processus de quartier durable. Comment ?

  • en impliquant les résidents, les personnes travaillant dans le quartier et les entreprises,
  • en s’appuyant sur plusieurs modes de participation : groupes de travail, activités interactives, réunions informelles, rencontres thématiques, voyages d’études dans d’autres villes suédoises, journal de quartier,
  • en valorisant les compétences des habitants : compagnie de car sharing basée sur le quartier, conseil communautaire local resident’s co-opérative développant des opportunités d’emploi.

Les élèves des écoles ont participé au projet d’un bâtiment scolaire en matériaux naturels, d’une maison des déchets, et d’un jardin musical. Le souci d’exemplarité et de communication est poussé jusque dans la création d’un lieu d’exposition et d’un emploi de « guide » assurant la présentation du projet et la visite de l‘écoquartier. Un bémol : parcours unique sur les toits végétalisés, les extérieurs et la recycling house, le tout agrémenté de commen­taires récités avec une certaine fougue théâtrale ne tolérant pas ou peu de questions diverses… on aimerait bien s’entretenir avec un habitant au détour d’un immeuble…

Enfin, pour enrichir la réflexion et à une autre échelle, il est intéressant d’évoquer un exemple local moins médiatisé mais néanmoins efficace : une coopérative d’habitants intégrant les principes de développement durable, au sein du lotissement « mange pommes » à Ramonville, en Haute Garonne. À l’origine, 5 familles souhaitent construire en commun en constituant une société coopérative de construction pour acheter un terrain communal d’1.5 hectare réparti en 15 lots. Les ingrédients : une maîtrise d’ouvrage déléguée et un architecte commun. Les facteurs de réussite du projet : partage de valeurs de vivre ensemble (solidarité, voisinage, principes écologiques), soutien et collaboration de la collectivité, temps de réflexion 3 à 5 ans. Et dire que c’était en 1985…

n° 6 - mai 2010