Témoignage

Le n° 308 de l’avenue Thiers, sur la rive droite de Bordeaux, est devenu le rendez-vous de l’architecture pour l’agglomération et l’Aquitaine. Cinq ans d’une aventure résumée avec ses principaux initiateurs, et de nouveaux défis pour la suite.

5 ans au 308

Benoît Hermet, rédacteur journaliste

Au départ, se réunir

Jusqu’au début des années 2000, l’Ordre des Architectes d’Aquitaine avait ses bureaux au 3e étage d’un immeuble du centre historique de Bordeaux, place Jean-Jaurès. Une implantation discrète à laquelle s’ajoutait la dispersion des autres entités de la profession (1) dans plusieurs endroits, occasionnant un manque de lisibilité, tant pour les confrères qu’auprès du public. La première priorité était de regrouper toutes les instances, et d’amener les architectes à se connaître davantage pour mieux se fédérer. « À l’époque, c’était notre mot d’ordre », rappelle Patrick Massaux, ancien trésorier de l’Ordre.

La traversée du fleuve

L’idée d’un nouveau lieu prend forme sous la présidence de Patrick Baggio en 2004. Après de multiples repérages dans l’agglomération, le choix se porte sur la rive droite de Bordeaux. « Nous voulions croire dans un quartier en pleine mutation », souligne ce dernier. « À Jean-Jaurès, nous avions vue sur la Garonne, nous avons traversé le fleuve », résume Michel Moga, son successeur à la présidence de l’Ordre. Le déplacement d’une adresse prestigieuse vers un secteur de la ville encore en devenir est déjà un message.
Mais l’initiative ne fait pas l’unanimité. Certains redoutent que la profession « s’enterre », et ce malgré l’arrivée du tramway à proximité. En outre, le bâtiment retenu est un ancien site de transformation d’électricité, à la silhouette massive de béton dont la réhabilitation ne va pas de soi.

L’usine réinventée

C’est un duo de jeunes architectes bordelais, Julie Fabre et Matthieu de Marien, qui remporte le concours en 2006, parmi 60 candidatures nationales. Afin de préserver le bâtiment existant et sa façade caractéristique, ils déploient son extension sur l’arrière. À l’intérieur, les espaces dédiés à la profession sont articulés autour d’un vide central d’où rayonnent de grands plateaux. Au rez-de-chaussée, la « nef » accueille les expositions, les rencontres publiques, les soirées festives… « Notre intervention était légère, efficace, on devait sentir 
la présence d’une usine », expliquent les architectes.

Un succès, des progrès à faire

Cinq ans après son inauguration, le 308 
a dépassé les espérances initiales, devenant un lieu phare de la culture architecturale en Aquitaine… Et même au-delà, car d’autres régions nous l’envient ! « C’est une dimension nouvelle alors qu’avant nous étions plus régaliens », note Patrick Baggio. La simplicité du bâtiment participe à cette démocratisation, bien que l’on reproche parfois au 308 son côté « happy few », y compris à l’égard des architectes.
L’un des impératifs reste la plus large appropriation de cet outil au service de la profession. Pour renforcer les liens, des conseils de l’Ordre sont organisés régulièrement dans les départements aquitains. Dans le même esprit, certaines conférences seront accessibles prochainement sur Internet. Les effets vertueux du 308 sont à cultiver au-delà de la géographie bordelaise…

Passeurs d’architecture !

Sur le terrain, le nouveau président de l’Ordre, Éric Wirth, constate une émulation grandissante des confrères bénévoles. « À nous d’aller vers les autres, de toutes les façons possibles », insiste-t-il… Les jeunes agences, l’école d’architecture, avec laquelle une relation vivante perdure.
L’ouverture au grand public est une autre vocation du 308 depuis sa création, et l’un des axes de sa feuille de route : poursuivre un programme d’expositions de qualité, développer les ateliers pédagogiques, qui connaissent déjà un beau succès… « Nous sommes des passeurs », conclut Jean-Christophe Masnada, ancien trésorier 
et acteur de cette aventure.


Rendez-vous pris dans 5 ans !

> Les dates clés
• Concours lancé en juin 2006
• Démarrage du chantier en février 2008
• Inauguration en mars 2009
• 2 ans d’étude, 12 mois de chantier

(1) Le Centre de Formation Aquitain des Architectes et Paysagistes, A&CP (Architecture et Commande publique), la Maison de l’Architecture d’Aquitaine, qui gère la programmation événementielle.--

n°23 printemps 2014 (03)