édito

ELAN ou l’histoire d’un jeu de mots raté d’avance.

Benoit ENGEL – Vice-Président du Conseil Régional de l’Ordre des Architectes de la Nouvelle-Aquitaine.

À l’heure où ces quelques lignes s’écrivent, la loi Elan n’est pas encore passée devant la commission mixte paritaire mais nous pouvons déjà prédire, sans aucun risque, un ratage sans précédent.

Sans caricature, cette loi a été écrite par certains grands bailleurs sociaux en réponse à la baisse des APL et a été reprise sans correction par le gouvernement. Le but à peine caché est bien de permettre à ces bailleurs d’être sur le champ concurrentiel des promoteurs.

Pour y parvenir, c’est simple : lever toutes les «  entraves  » d’ordre administratif issues de l’ancien monde : les règles de la commande publique et de la MOP entre autres.

Mais c’est oublier que ces textes sont le fruit de longues concertations, d’expériences, d’ajustements au fil des politiques et qui n’avaient comme but que la promotion de pratiques vertueuses, l’évitement de la corruption, l’intérêt public, la qualité du cadre bâti et de vie. Ces derniers termes sont d’ailleurs entièrement absents du texte de loi !

L’Ordre, de manière inédite, n’a pas été consulté lors de l’écriture de la loi, et c’est à dessein, puisque la part du rôle de l’architecte dans la production de logement sera celle du permis du construire pour ne pas dire de tamponneur.

La voix de l’Ordre s’est faite entendre, de concert à beaucoup d’autres. La mobilisation fut belle. Le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes de la Nouvelle-Aquitaine a joué pleinement son rôle d’influenceur en rencontrant à travers l’ensemble de la Région 14 députés et 7 sénateurs. Le 17 mai, nous avons organisé au siège et dans les pôles différentes manifestations. Nos arguments ont été entendus par les députés mais la voie dominante reste celle de l’étiquette politique. Ils ont été compris par les sénateurs et de bénéfiques corrections ont été apportées.

Là où la politique des grands ensembles et le coût de leur requalification (y compris sociale), pouvaient être évalués ; là ou une véritable réflexion sur le mal logement pouvait être menée, la loi Elan, non seulement ne propose rien mais elle accentue encore les difficultés et hypothèque pour l’avenir toute possibilité d’actionner les leviers nécessaires à une action politique intelligente sur la question du logement en France.

C’est pourquoi retrouvez et soutenez le collectif Ambition Logement qui regroupe fédérations, associations, syndicats… et l’Ordre des Architectes sur ambitionlogement.org.

n°40 - automne 2018 - septembre
(PDF - 2.6 Mo)